Le confinement, ou l’opportunité d’une solidarité retrouvée
Distanciation sociale, isolement, quarantaine… tant de termes anxiogènes dignes des meilleurs épisodes de Black Mirror. À croire que la lutte mondiale contre l’épidémie de Covid-19 impliquerait de tous nous extirper temporairement du monde social, de nous enfermer individuellement dans une bulle domestique en attendant patiemment que la vie reprenne son cours. Et pourtant. Depuis le début du confinement, se sont déployées de multiples initiatives d’entraide et de solidarité, à échelle globale mais aussi et surtout, à échelle locale. Un véritable pied de nez à ce virus insidieux qui pensait pouvoir mettre entre parenthèses notre sens du collectif.
Un fleurissement d’élans de solidarité, partout sur le territoire
Tout en étant calfeutrés chez nous, nous témoignons du soutien au personnel hospitalier quotidiennement à 20h00. Pendant quelques minutes, durant desquelles jaillissent des applaudissements et exclamations de « merci » et « bravo » fenêtres grandes ouvertes, nous sortons alors de cette torpeur solitaire et nous souvenons appartenir à cet ensemble, ce tout qui nous paraissait si lointain. Mais les expressions d’entraide ne s’arrêtent pas là. Que ce soit à travers le regain des dons du sang (jusqu’à trois fois plus de participation qu’habituellement, dans certains centres), les preuves de soutien de restaurateurs adressées aux soignants, ou encore les nombreuses affichettes apposées dans les halls d’immeubles pour venir en aide au voisinage, les initiatives individuelles ne manquent pas.
Du côté de ceux qui sont sur le front de la bataille contre l’épidémie, la plateforme En première ligne, réseau d’entraide dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19, propose de mettre en lien les travailleurs et travailleuses “en première ligne” ainsi que les personnes faisant partie des population à risque avec des citoyennes et citoyens désireux de participer à cet élan de solidarité.
L’Etat a suivi le mouvement en créant la plateforme “Je veux aider – Réserve civique Covid-19″, construite en lien avec les plus grands réseaux associatifs et les plateformes déjà existantes. Elle permet aux structures (associations, CCAS, MDPH, collectivités, opérateurs publics, etc.) de faire état de leurs besoins de renforts concernant les aides alimentaires et aides d’urgence, la garde exceptionnelle d’enfants, l’accompagnement des personnes fragiles isolées, mais aussi la solidarité de proximité.
Des initiatives qui se multiplient jour après jours et qui interrogent sur le devenir de notre société en ce sens. L’après-confinement confirmera-t-il cette tendance globale vers un véritable altruisme, un sens du « vivre ensemble » ? Après tout, des actions de ce type existaient déjà auparavant (Les Restos du Cœur, Les Petits Frères des Pauvres, ou plus récemment Entourage, un réseau solidaire créée en 2016, qui permet lui aussi de venir en aide aux personnes sans-abri, via une application) mais n’avaient pas le même retentissement. Désormais, la seule solution pour sortir de cette pandémie le moins affectés possible est la solidarité, et toutes les actions sont les bienvenues.
L’espace numérique comme théâtre des actions d’entraide locale
Dans cette période qui nous force à limiter nos liens avec le monde extérieur à un écran d’ordinateur ou de téléphone, les actions d’entraide prennent essentiellement racine dans les plateformes numériques. Si nous pouvons observer dans les cercles d’amis une envolée des « whatsapéros » et autres soirées jeux de société sur Houseparty, de nombreux groupes ont également été créés sur Facebook pour donner l’occasion à chacun de venir en aide (via la livraison de courses ou encore la garde d’enfants) au personnel soignant et aux personnes les plus vulnérables.
Le réseau social Nextdoor, lui aussi, propose de mettre en relation des habitants d’un même quartier pour stimuler l’entraide locale. Le site a enregistré un véritable bond dans ses chiffres depuis le début du confinement, puisque les publications ont été multipliées par quatre et les commentaires par huit en une semaine seulement.
Pour ne pas oublier les personnes âgées qui souffrent tout particulièrement de l’isolement, une joyeuse équipe de dix cousins a créé la plateforme 1 lettre 1 sourire, qui offre la possibilité à chacun de rédiger une lettre, qui sera alors envoyée à un résident en Ehpad et ensoleillera sa journée. C’est ainsi que plus de 15 000 lettres ont déjà été envoyées.
En clair, sur les réseaux sociaux, les actions de solidarité sont nombreuses puisque le social media est devenu en quelques semaines le principal forum d’information avec une augmentation du taux de fréquentation de +61%. Les entreprises et collectivités se sont saisies de cette fulgurante percée du web pour transformer leur manière de communiquer sur les réseaux sociaux et n’ont sans doute jamais été aussi innovantes pour tester de nouveaux formats social media, c’est ce que nous verrons lors d’un prochain article.
Et après ?
Lorsque nous songeons à la sortie de cette expérience inédite et collective, il apparaît inenvisageable d’aborder l’après-confinement comme un simple retour à la « normale » (si tant est que l’avant-confinement puisse être considéré comme la normalité). En effet, au-delà de la joie et l’euphorie que nous produiront les retrouvailles avec nos proches, il semble indispensable de questionner nos modèles et réinventer notre rapport à l’autre, à l’aune de ce que nous vivons.
Demain, pour faire société, prenons acte des enseignements de cette crise. Faisons en sorte que le succès des multiples réseaux d’entraide créés pendant le confinement déclenche une prise de conscience collective avec des effets de long-terme, dont la priorité sera la solidarité et le vivre ensemble.
Sources :
https://www.lebonbon.fr/paris/news/lettre-sourire-plateforme-solitude-ehpad/
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