Challenge Administration 2020 : une nouvelle ressource de l’État pour bâtir l’administration de demain ?
Face aux controverses liées à la réforme territoriale, le ministère du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l’État a souhaité donner la parole aux jeunes. Coutumier de l’unilatéralité, il relève le défi de la rencontre avec le Challenge Administration 2020. Ce – ou plutôt d’administration – permet aux étudiants de mener une réflexion collective sur les politiques publiques de demain. L’occasion de révéler le potentiel de futurs managers publics, volonté de dépoussiérage des pratiques ou coup de pub ?
Pour la deuxième année consécutive, la Direction Générale de la Modernisation de l’État (DGME) organise le Challenge Administration 2020. Aménagé en trois phases (lancement des projets, demi-finale et finale), de fin novembre 2010 à aujourd’hui, il s’inscrit dans un temps d’écoute et de rencontres entre l’administration et les étudiants.
Un temps d’écoute et de rencontres
Le principe est simple : des équipes d’étudiants d’écoles ou d’universités proposent chacune un projet concret de modernisation tout en tenant compte des contraintes réelles de mise en œuvre. On peut toutefois s’interroger sur son esprit : plébiscite de la RGPP ou réelle volonté d’impliquer de nouvelles voix ? Enquête…
Pour guider les participants, trois thématiques, qui constituent la substantifique moelle de la DGME, ont été délimitées : la qualité de service, l’innovation participative ou l’optimisation des organisations. Des questions pour le moins dans l’air du temps.
Pour donner du corps à leurs inspirations, les participants sont encouragés à rencontrer des experts ainsi qu’à rassembler des soutiens. Selon le porte-parole du concours, « l’étudiant qui rencontre le porteur de projet participe ainsi activement à l’innovation administrative ». L’objectif est la « rencontre intergénérationnelle ». S’il s’agit d’associer la vision enthousiaste et novatrice des étudiants à celle des experts de l’administration, pourrait-on craindre que le savoir-faire et les années excluent l’inventivité ?
Une grande nouveauté cette année… un blog dédié et ouvert à tous
Une grande nouveauté cette année : chaque équipe doit approfondir et argumenter ses propositions sur un blog dédié et ouvert à tous : blog.administration2020.fr. Les équipes doivent développer différents aspects de leur projet.
Si la démarche est progressive, elle n’en est pas moins collaborative.
Les étudiants peuvent communiquer sur leur projet vers les publics extérieurs, recruter des leaders d’opinion numériques et des bloggeurs mais également des experts de l’administration. Libre à chacun d’y faire des commentaires.
Un partenariat éditorial d’une semaine avec le blog magazine Tout Ca Magazine animé par Laurent François, bloggeur et « digital influence strategist », a permis de médiatiser l’événement.
Les réseaux sociaux ne sont pas en reste car les équipes relaient l’avancement des projets sur Twitter et Facebook. Un « outil de rencontre » et « un véritable levier » selon les organisateurs.
Des opportunités intéressantes
Ce concours offre, pour les plus inspirés, des opportunités intéressantes : la présentation du projet aux personnalités réunies au Ministère pendant deux jours, un voyage d’étude, des stages et des lots high-tech ! Les moins inspirés ne sont pas en reste ; ce challenge est un atout pour un emploi futur et peut-être bien l’occasion de se faire repérer ?
Ce jeu d’administration a le mérite de s’intéresser aux étudiants – futurs décideurs – et les amène à rencontrer des spécialistes du monde public. Une immersion anticipée en quelque sorte et un bon moyen pour la DGME de bénéficier d’une ressource humaine fraîche, rentable et motivée. Plébiscite de la RGPP, certes, mais avec une réelle démarche d’échanges. En somme, une « alimentation réciproque » selon l’un des responsables du projet.
Jeudi 11 février à 16h30, les concurrents se présenteront face à un jury de personnalités pour la remise des prix sous le haut patronage du ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État.
En tant que participante – et lauréate – du Challenge, je tiens à dire qu’il s’est avéré au final que l’enjeu s’est trouvé au-delà de la RGPP… mais a aussi permis une redéfinition des enjeux de cette RGPP.
Ce qui m’a particulièrement interpellé au cours de cette finale c’est qu’on s’est tous retrouvés en face de personnes qui étaient prêtes à remettre en question certaines de leurs actions. Notamment, puisque c’est le sujet qui nous intéressait dans notre projet, la présence sur les médias sociaux des décideurs. C’est in fine ce qui a fait tout l’intérêt de ce Challenge, sans remettre en cause des principes RGPPesques on a pu montrer en quoi il y avait des failles à trop vouloir raisonner en termes de rentabilité, de bénéfices,… et c’était pour nous le véritable Challenge.
Lorsqu’on regarde les projets qui ont remporté les deux premières places, on voit des projets qui proposaient un bénéfice en termes de valeurs, un bénéfice humain (pour les premiers, une amélioration de la formation des agents en leur proposant de s’investir différemment ; pour les seconds, une amélioration de la relation à l’usager par une présence organisée sur les médias sociaux). Ces projets ne promettaient pas d’économie en millions d’euros… ils coûtent même un peu d’argent à mettre en place.
Personne ne sait ce qu’il va advenir de l’ensemble des projets proposés qui non seulement méritent tous d’être mis en oeuvre, mais qui en plus peuvent tous être mis en oeuvre dès aujourd’hui. Mais le simple fait que les premiers prix ne se placent ni en termes de “réduction d’effectif” ni de “réduction des dépenses” laisse penser que peut-être, quelque part, la RGPP entend défendre une nouvelle ligne : celle de l’amélioration des conditions.
En soi, ce choix n’est certes que symbolique mais ce symbole est tout de même fort : une volonté de réengagement de l’Etat auprès de ceux qui le font, les agents et les citoyens.
Je suis peut-être trop optimiste, mais j’aime penser que chacun des participants a su par sa force de conviction et son enthousiasme déplacer la ligne éditoriale proposée. De la défense affichée et assumée de la RGPP, on a tous voulu proposé une certaine “redéfinition” de cette RGPP.
… c’est un début.